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Poll Sud : Rossel décrypte le comportement des francophones

Mardi 20 Juin 2023

Poll Sud : Rossel décrypte le comportement des francophones

Une fois n’est pas coutume, il arrive aux régies de se pencher sur d’autres sujets que le média au sens strict. Des remontées d’informations qui seront également utiles aux rédactions, et permettent aux marques d’obtenir comme ici un aperçu détaillé des tendances post-Covid, avec une population déjà au cœur de nouvelles crises. Parlant de "Poll Sud" - cette vaste étude de Rossel Advertising sur le comportement des Belges francophones présentée hier soir -, les messages sont aussi optimistes, et le travail réalisé avec des partenaires spécialisés, riche d’enseignements.

Pour cette approche en plusieurs couches, la régie s’est en effet doté de deux bureaux d’études et de conseil bien installés dans la place : Wide et Listen. Le premier plutôt pour le qualitatif et l’analyse, le second pour la quantification. Une phase exploratoire préliminaire a été menée pour en dégager 10 tendances principales, suivie d’une étude dite de validation fondée sur un échantillon de 1.200 personnes (18-74) questionnés entre avril et mai derniers. 

Le rapport nous précise que l’intention de Poll Sud est de briser les stéréotypes trop souvent associés aux francophones et apporter une lecture objective et documentée sur ce qui influence leurs consommations. Du reste, en phase avec sa nouvelle signature "Tout en Proximité", Rossel Advertising veut à ce titre revendiquer une position de partenaire stratégique, développant « des recommandations et opportunités pour les marques » et permettre aux annonceurs de « travailler au plus près leurs messages et les adapter au mieux à ces audiences bruxelloises et wallonnes ». La portée des médias de l’éditeur étant la zone francophone de notre pays. 

« La compréhension de nos audiences ne se limite à leur consommation média », développe Edouard De Witte, Marketing Director de Rossel Advertising. « Les facteurs psychologiques et sociétaux sont importants, et les attentes - qu’elles soient éditoriales ou liées aux marques - passent par la proximité culturelle. Ce n’est pas une simple question de géographie. Sachant aussi ces attentes bougent. » 

Ce baromètre Poll Sud se destine par définition à se répéter tous les deux ans afin de tracer des tendances effectives et émergentes, dont les insights seraient utilisés par le marché. Lesquels contenus se répartissent dans le temps et par secteur, à commencer par un rapport général incluant un volet sociétal et un focus sur la santé. 

La première thématique verticale traitera de la mobilité. En parallèle, le site dédié dévoilera au fur et à mesure des données et insights accessibles à tous.

Quelques découvertes en avant-première

« Nous sommes bien sortis de l’ère Covid, et après une phase de sidération, la population a dû admettre ne pas pouvoir échapper au changement. L’histoire se répète, certes, mais l’angoisse qui s’était installée a pris du temps pour être digérée », préface Martine Clerckx, co-fondatrice de Wide, avec un ton résolument optimiste. « Cela évolue », ajoute-t-elle. L’étude quantitative établit bien la part des sentiments : si 70% des interrogés considèrent que le futur détient de belles opportunités, ils sont autant (69%) à déclarer que l’avenir est angoissant.

On ne s’étonnera pas dès lors que les attentes vis-à-vis du marketing relève beaucoup du sociétal et du RSE, et ce, depuis trois à quatre ans. Pourtant, on constate dans l’étude un groupe d’attitudes assez égocentristes, dont les dénominations sont en soi déjà éclairantes : "Après moi le déluge", "Sur mon île" et autre "Dansons sur le volcan"… Des postures qui, heureusement, ne provoquent pas tellement des réactions égoïstes mais plutôt des "recentrages sur son propre équilibre" – "Profiter sans penser à demain" ou "Arrêter de suivre l’actualité" (un challenge pour l’éditeur !). Ce serait plus le fait des « jeunes des centres urbains, pour ne pas dire de Bruxelles, et de classes sociales élevées », admet Yannick Krings, Research Director de Listen. Mais dans l’autre sens, au plus la population est jeune, au moins elle se montre discriminante, visant l’équité entre groupes. 

Martine Clerckx note aussi l’absence de langue de bois et de politiquement correct, du côté des jeunes francophones : « En fait, le woke et la cancel culture sont nettement plus visibles dans les médias du Nord du pays. » A ce sujet, et c’est peut-être une surprise, les francophones se sentent davantage belges, citoyens du monde ou européens que wallons, francophones ou bruxellois. Il faut dire que 29% d'entre eux vivent à moins de 20km d’une frontière, sans compter le caractère très cosmopolite de Bruxelles et ses alentours. A cet égard, 60% de l’échantillon se sent culturellement proche de la France. 

Les chiffres contrastés entre générations, quant à eux, doivent-ils faire croire à un divorce générationnel ? « Non, mais certainement à un mouvement de bascule visible aux alentours de 44-45 ans. Au global, la famille reste un havre sinon de paix, de confiance. Et l’intimité entre jeunes et grands-parents est rassurante », nous rassure Martine Clerckx. 

La question générale sur la confiance dans l’avenir est aussi rassurante et collecte 61% des suffrages. Plus clairement auprès des moins de 25 ans (69%), du rural (69%), des hommes (68%) et des pouvoirs d’achat élevé : un fait logique. 

Jusqu’ici et malgré les crises à répétition, les belges francophones sont 78% à dire qu’ils « s’en sortent ». Ceci en ayant puisé dans leurs réserves (55%), réduit les coûts fixes (73%) et en restant « sur le fil » pour la moitié d’entre eux … Une situation fragile que le marketing des différents secteurs devrait prendre en compte aux côtés de la priorité sociétale, même si ces sujets ne font pas nécessairement bon ménage. À l’instar des prix bas et des promos en alimentaires versus les circuits courts et produits bios. Relevons de tout même qu’ils sont 51% à prendre en compte le positionnement prix des marques de façon prioritaire, contre 27% pour leurs efforts ESG. Autant le savoir.

L’étude Poll Sud propose encore une nouvelle typologie en « 4 segments pour une nouvelle lecture » de ces citoyens-consommateurs, tant les situations peuvent varier dans cette crise persistante. Ainsi, nous trouvons les Stabilisés et Ajusteurs qui n’ont pas dû produire beaucoup d’effort pour s’adapter au nouveau contexte (48% de la population). Ensuite, les Contraints et les Explorateurs : si les premiers (34%) ont mis en place des mesures parfois radicales pour rester à l’équilibre, les seconds (18%) portent un joli nom qui cache la créativité du désespoir - prises de risque, revenus additionnelles, voire pratiques illégales (sic). 

Comme autre mouvement de fond, on note un passage du paraître à l’être, la recherche vers plus d’authenticité à tous points de vue - la publicité est concernée - et aussi le bon usage des technologies : celles-ci peuvent aider aussi à la qualité des relations. Ceci malgré le fait que, par exemple, « les réseaux sociaux se focalisent beaucoup sur l’angoisse. » 

Mais les gens ne seraient pas dupes et beaucoup de signaux positifs y sont également présents, d’après ces analyses. Edouard De Witte fait le lien avec la communication des marques : « Les gens ont besoin de concret, ils ne sont pas idéologues. Nous devrions avoir plus de campagnes avec du fond, du vrai contenu, et en évitant le greenwashing, bien sûr. » Et afin de donner aux professionnels des indications claires sur ces attendus, les trois protagonistes du Poll Sud développent donc le sondage par secteur. « Ceci sera utile aux rédactions de nos médias, et la diffusion des insights par catégorie sera aussi au cœur du travail de la régie dans les semaines à venir », conclut le responsable marketing. Il est fort probable que les intéressés les attendent de pied ferme.

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