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Matt Brittin (Google) : "Search est un bon moyen de lutter contre la désinformation"

Jeudi 11 Juillet 2024

Matt Brittin (Google) :

Comme beaucoup de représentants des big tech, Matt Brittin, le CEO EMEA de Google, était présent aux Cannes Lions. Nous l'avons rencontré pour parler de plusieurs sujets d'actualité, dont l'évolution du Search à l'aune de l'IA. 

Il y a fort à parier que 2024 entrera dans l’histoire comme l’année de la GenAI. Outre des possibilités créatives accrues et l’impact sur le contenu même de nos jobs, l’arrivée des chatbots aura également une incidence sur la manière dont les consommateurs cherchent des informations en ligne. Cela n’affecte-t-il pas également le Search et le trafic qu’il génère ?

À ses débuts, Google était un moteur de recherche, un moyen astucieux d’obtenir rapidement une réponse à une question simple. Cette mission centrale, qui consiste à organiser l’information et à la rendre utilisable par tout le monde, n’a pas changé. Aujourd’hui encore, Google Search est l’endroit où se rendre si l’on veut comprendre quelque chose d’important.

Au début, une page avec dix liens bleus s’affichait pour chaque recherche. Aujourd’hui, le contenu des résultats de recherche est bien plus large : outre les liens, il y a aussi des photos, des cartes, des vidéos, etc. La GenAI y ajoute de l’interactivité et de l’engagement. Elle nous permet ainsi d’encore mieux servir les internautes dans davantage de langues et de manière plus créative. Elle nous aide également à effectuer des recherches plus longues et plus complexes pour fournir une réponse utile, ce qu’on n’obtenait pas toujours avec le moteur de recherche traditionnel. Par exemple, si vous demandez à Google "Que faire à Cannes ?", AI Overview vous donnera un aperçu pratique et immédiatement applicable. Et bien sûr, même dans ce cas, les gens cliqueront sur les liens proposés dans les résultats.

D’autre part, nous comprenons très bien l’importance de la publicité et des revenus qu’elle génère pour l’open web : il s’agit d’un secteur important qui, entre autres, nous aide à financer le journalisme politique. Nous sommes les plus grands bailleurs de fonds du journalisme politique. Par conséquent, Search est un bon moyen de lutter contre la désinformation. 

Il serait donc insensé de prétendre que la GenAI signe l’arrêt de mort de Search ?

Search est bien vivant et continue d’évoluer : il est au cœur de notre activité. Il ne faut pas oublier non plus que l’IA est une technologie très vaste et que les chatbots ne sont qu’une application parmi d’autres. Résumer des e-mails dans votre outil de messagerie en est une autre, tout comme vous aider à écrire de manière productive. Pensez aux premiers jours de l’internet mobile : nous sommes tous les deux suffisamment vieux pour savoir à quel point c’était pénible jusqu’à l’arrivée des smartphones, des app stores et de l’internet à haut débit.

Bon nombre d'innovations sont d’abord lancées aux États-Unis. L’Europe risque-t-elle d’être négligée, comme l’a écrit récemment l’un de nos chroniqueurs, parce qu’elle s’est montrée trop zélée dans sa réglementation ?

J’ai été responsable de nos développements en Europe pendant près d’une décennie. Au cours de cette période, je pense que nous avons en effet vu l’Europe prendre l’initiative en matière de réglementation sur des questions complexes telles que la protection de la vie privée ou les droits d’auteur, mais aussi avec le DSA, le DMA ou la loi sur l’IA. 

Mon rôle a été de faire en sorte que Google comprenne vraiment l’Europe et que l’Europe comprenne Google et la technologie, et de veiller à ce que la réglementation ne soit pas perçue comme une menace, mais comme un élément de la façon dont nous, en tant que société, gérons la technologie pour que tout le monde puisse en bénéficier.

C’est d’autant plus important avec l’IA. S’il y a une chose qu’elle nous a apprise, c’est que si les gouvernements, les entreprises et les communautés s’unissent, nous pourrons tirer le meilleur parti de ces opportunités. 

Je pense que la loi sur l’IA est un bon exemple : il s’agit d’un cadre qui ne parle pas d’éliminer cette technologie, mais qui indique que l’on se préoccupe de certaines de ses utilisations. Maintenant que la loi existe, nous pouvons collaborer avec l’UE pour voir comment l’interpréter. Nous avons besoin d’un ‘code de pratique’ et d’un dialogue sur la réglementation. J’ai remarqué qu’il existe en Europe une volonté d’avancer sur ce sujet et j’aimerais que nous puissions donner notre avis sur la façon dont cette technologie pourrait être une "force for good". 

En d’autres termes, l’IA comporte des risques et des opportunités. Notre mantra, c’est d’affirmer notre volonté d’être audacieux, d’investir dans les dernières innovations et de montrer ce que la technologie peut faire, de manière responsable, pour améliorer les choses, comprendre les risques et collaborer – y compris avec les pouvoirs publics – pour les réduire. Nous sommes très transparents à cet égard.

D’autre part, je suis très fier que les produits Google contribuent très largement au produit intérieur brut. La plupart de nos clients sont de petites entreprises qui peuvent désormais faire des affaires à l’échelle internationale, ce qui n’était auparavant possible que pour les plus grandes sociétés. 

Supposons que nous nous rencontrions à nouveau à Cannes dans un an. Les cookies tiers auront-ils disparu d’ici là ?

Les cookies ont permis de mettre en œuvre une publicité personnalisée, de financer le journalisme et de rendre l’internet abordable. En raison de diverses préoccupations relatives à la protection de la vie privée, ils seront progressivement supprimés de façon contrôlée et responsable. Nous développons depuis un certain temps des outils au sein du Privacy Sandbox qui devraient perpétuer l’existence d’une publicité personnalisée efficace, car cette dernière est vitale pour l’écosystème. Sans publicité personnalisée, on perdrait environ 50% de ses revenus. L’abolition a été postposée parce que, alors que nous étions prêts, le secteur a clairement fait savoir qu’il ne l’était pas. Entretemps, les instances de régulation examinent de plus près les alternatives. Celles-ci devraient être prêtes au début de l’année 2025.

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