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Réseaux sociaux : mes prévisions pour 2025, par Xavier Degraux

Jeudi 19 Décembre 2024

Réseaux sociaux : mes prévisions pour 2025, par Xavier Degraux

Impact de l'IA générative, approches organiques et payantes, canaux, formats, usages, régulation... Prédire l'évolution des réseaux sociaux est hyper casse-g****.

Avec un doigt mouillé (et 25 ans d'expérience en numérique), je vous livre néanmoins mes sept prévisions pour 2025. En espérant surtout alimenter la réflexion et déclencher des échanges passionnants.

1. Toujours plus de "pay to play"

La part des "social ads" dans les budgets marketing continuera d’augmenter, malgré une régulation accrue et la méfiance croissante des utilisateurs envers les publicités ciblées.

D'une part, l'intelligence artificielle générative va décupler la production de contenus organiques, renforçant le niveau de "concurrence" et réduisant encore, de facto, la visibilité organique moyenne, déjà volontairement plombée par les plateformes.

D'autre part, l'IA va permettre aux annonceurs :
  • une analyse plus fine des intentions et des comportements des utilisateurs, surtout au niveau du timing des campagnes,
  • une segmentation optimisée,
  • une personnalisation des messages en temps quasi réel, qui améliorera les taux de conversion,
  • des enchères automatiques et dynamiques optimisées par l’IA, qui permettront d'optimiser comme jamais les budgets.
2. Vidéos : il IA un peu plus, je vous les mets ?

L’IA facilitera également la production de vidéos, principalement ultra-courtes (moins de 15 secondes), voire personnalisées à grande échelle, ainsi que leur analyse. Les algos de TikTok, Instagram Reels et de YouTube Shorts n'auront que l'embarras du choix (vertical).

À la marge, les vidéos longues (de plus de 7 minutes), sur YouTube et Facebook, vont continuer à engager des publics de niches autour d'argumentaires profonds, de tutos et de docus. À l'horizontale.

Entre les deux, les vidéos "molles" (les traditionnelles 1'30'' de papa), peu engageantes, vont morfler comme jamais.

3. À la lumière du "dark social"

Le "dark social" (messages privés, partages discrets, groupes fermés, sauvegardes de posts...) et le "dwell time" (temps passé sur un contenu), popularisé par TikTok, finiront de détrôner le classique taux d'engagement, basé sur les likes, les commentaires et les partages.

Autrement dit, ces signaux invisibles dicteront comme jamais l'intensité de la viralisation des contenus organiques.

Les pros du marketing digital et des réseaux sociaux devront
  • soigner le caractère immersif de leurs contenus,
  • revoir complètement leurs KPI's qualis et quantis ainsi que leurs grilles d'analyse,
  • accepter de naviguer davantage à l'aveugle, en s'éloignant des vanity metrics... Ou compenser avec GA4 et des outils avancés de social listening, voire des sondages post-campagnes.
4. Vous avez dit messageries "privées" ?

Les messageries et les groupes privés (Whatsapp, Messenger, Instagram DM, Discord...) deviennent des canaux d’interaction persos et pros privilégiés.

Un terrain fertile pour des campagnes organiques et payantes ? Pas si vite !

Techniquement, culturellement et éthiquement, infiltrer ces canaux privés avec la bonne approche (éditoriale, conversationnelle, instantanée, généreuse...) restera un véritable casse-tête.

Et les chatbots ne séduiront pas davantage en 2025 qu'en 2024, 2023, 2022... Aussi "fins", aussi nourris à l'IA et aussi interactifs soient-ils.

5. Ambassadorat généralisé

En B2B particulièrement, 2025 rimera avec "ambassadorat".

Pour incarner leurs entreprises, augmenter leurs empreintes numériques à coûts réduits et fidéliser leurs collaboratrices et collaborateurs, CEO, membres de la direction et ambassadeurs plus ou moins bien sélectionnés seront invité.e.s, par leurs responsables MarCom et/ou RH, à prendre la plume... Ou à la confier à l'IA, voire à un.e ghostwriter.

Mal définies, mal gérées, mal comprises ou mal soutenues, la plupart de ces initiatives feront "pschit" après moins de six mois.

6. Les (petites) bulles de Threads et de Bluesky

Malgré la vague d'intérêt et d'espoir suscitée par l'élection de Trump-Musk, les alternatives à X (ex-Twitter) resteront des terrains d'expérimentation à l'impact limité.

Même si elle restera la plus populaire d'entre-elles, Threads ne verra pas son audience et leurs usages exploser, malgré les effets de levier que continuera à créer Meta avec Facebook et Instagram, dont Threads, trop hâtivement monétisée, aura bien du mal à se différencier.

Bluesky, qui était 19 fois plus petit que X en Belgique en octobre, va réduire l'écart, en se positionnant davantage en opposition à l'entreprise qui l'a vue naître et à celui qui l'a rachetée qu'en se distinguant par une feuille de route jalonnée d'innovations.

Et Mastodon ? Son interface complexe et sa structure fédérée constitueront toujours des barrières pour l'utilisateur moyen.

7. Un criant silence européen

J'aimerais me tromper. Mais je crains que le "Digital Services Act" (DSA) reste, une année de plus, un excellent règlement européen... sur papier.

Outre une mesure plutôt symbolique à l'encontre de X, qui permettra à la Commission de sauver la face sans endommager la relation avec Trump-Musk, aucune mesure régulatoire, pas même l'imminent "IA Act", ne frappera fortement les réseaux sociaux dominants en 2025 sur le marché européen.
 
Il faut dire que les Meta, Bytedance & Cie, qui ont des moyens autrement plus importants que les régulateurs, poursuivront avec agilité leurs danses du ventre avec quelques mesures "sociétales" de contournement aussi tardives qu'artificiellement supportées (âge des utilisateurs, procédures anti-harcèlement, données personnelles, fake news...).

Ils continueront aussi, sans craindre le moins du monde la naissance de concurrents européens, à dénoncer une régulation "incohérente". Pire : ils "puniront" encore l'Europe, en évitant d'y déployer leurs dernières avancées. Comme c'est déjà le cas avec leurs modèles d'IA.

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