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Astro Teller : mon scepticisme intérieur a besoin d'un verre, par Danny Devriendt (IPG Dynamics)

Jeudi 13 Mars 2025

Astro Teller : mon scepticisme intérieur a besoin d'un verre, par Danny Devriendt (IPG Dynamics)

Quand Astro Teller annonce quelque chose, je réagis comme un rat de laboratoire qui vient d’entendre le distributeur de croquettes. L’homme se fait appeler le "Capitaine des Moonshots" et contrairement aux pseudo-gourous de LinkedIn, il a les moyens de ses ambitions. Mon scepticisme européen se contracte, murmurant : « Doucement, c'est peut-être encore un de ces discours lunaires. » Mais je me rappelle aussitôt : Astro a tout à la fois l’audace et le budget pour transformer ses folies en réalité.

Cette semaine, au SXSW, au milieu d’une ville alimentée par une innovation épuisante et un café irresponsablement corsé, Teller a lancé son dernier projet : The Moonshot Podcast. Ma première réaction ? Un mélange de "Oui, encore du Astro !" et "Oh non, pas un autre podcast". Mais voilà : ce n’est pas juste un énième podcast, c’est une production Astro Teller. Le lieu du lancement ? Le Red River Ballroom du Thompson Hotel, un endroit si léché qu’on dirait un rêve fiévreux de capital-risqueur. On y entendrait presque le bourdonnement lointain d’un ascenseur futuriste et le bruissement feutré de NDA fraîchement imprimés.
X marque l’endroit (où les idées folles explosent)

Si vous ne suivez pas Astro Teller comme un fan obsessionnel (coupable), voici le résumé express : il dirige X, le labo semi-secret d’Alphabet où les idées technologiques les plus dingues soit transforment le monde, soit partent en fumée dans une explosion glorieuse. Google Glass ? C'était X. Waymo et ses voitures autonomes ? X aussi. Les drones de livraison Wing ? Toujours X. L'internet alimenté par des ballons de Loon ? Euh... Disons que c’était X aussi, mais pas dans la catégorie des succès.

Pourquoi suis-je obsédé par Teller ? Parce qu’il fait partie de cette espèce rare de leaders à l’énergie inépuisable, qui allient ambition cérébrale et capacité à se vautrer publiquement sans honte. Il prêche l’évangile de l’échec rapide, de l’apprentissage express et du passage à autre chose avant même que les cendres ne refroidissent.

Et puis, avec un nom comme Astro Teller, il est soit un visionnaire tech, soit un méchant de James Bond. Franchement, les deux me conviennent.

Sur scène avec Astro, trois intervenants qui semblaient tout droit sortis du casting d’une "dramédie" de science-fiction : Adam Savage, le gars de MythBusters qui vit pour faire exploser des trucs au nom de la science ; Nick Thompson, CEO de The Atlantic, un magazine si ancien qu’il doit encore avoir des archives sur parchemin, mais qui navigue entre relique du print et mastodonte digital ; et Dr. Catie Cuan, chorégraphe pour robots. Oui, elle apprend aux robots à danser. Ça existe. Moi aussi, j’ai eu du mal à encaisser l’info.

Savage, fidèle à son amour du chaos, a défendu la nécessité de la destruction au service de l’innovation. Thompson a philosophé sur la façon dont le bon récit peut transformer un échec cuisant en victoire à retardement. Et Cuan ? Elle m’a soufflé en expliquant que programmer des robots pour danser n’est pas juste un délire artistique, mais un moyen de changer la perception humaine de l’IA. Ouais. Bon. 

Regardez, j’adore Astro Teller, mais même moi, je vois l’ironie de parler d’échec tout en grignotant des amuse-gueules gastronomiques dans un hôtel cinq étoiles. Mais voilà le truc : dans l’univers de Teller, l’échec n’est pas un mal nécessaire. C’est l’événement principal.

« On ne rate pas juste pour le fun », a déclaré Astro avec le calme olympien de quelqu’un qui a un budget Google illimité. « On échoue pour apprendre - vite et à moindre coût - afin de découvrir ce qui fonctionne réellement. » Savage a acquiescé : « Chaque fusée que je construis, chaque machine que je teste, rien ne marche du premier coup. Tu apprends de l’explosion, tu ramasses les morceaux et tu construis mieux. » Cuan expliquait que faire danser des robots, c’est un cycle sans fin de ratés. Mais chaque algorithme bancal, chaque faux pas mécanique, les rapproche de quelque chose qui semble vivant. Thompson a bouclé la boucle : « Les gens adorent se moquer des échecs spectaculaires. Mais si tu contrôles le récit, tu transformes la gamelle en tremplin. »

Donc, c’est quoi, ce podcast d’Astro ? Simple : embrasser l’échec comme un passage chaotique mais essentiel vers l’innovation. Il veut rendre le "fail fast" aspirant, parce que la réalité, c’est qu’on apprend plus des désastres que des parcours sans accroc. Attendez-vous à des plongées profondes dans des idées folles, des entrepreneurs oscillant entre génie et burn-out, et, si on a de la chance (LOL), une apparition des robots danseurs du Dr. Cuan.

En sortant du Thompson Hotel sous le soleil d’Austin, un espresso doppio glacé à la main, j’ai ressenti ce frisson d’optimisme délirant. Cette sensation que peut-être, juste peut-être, l’impossible est à portée de main.

Ou au moins à portée de moonshot.

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