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Du pognon et de la parité, par Bruno Liesse

Dimanche 2 Février 2025

Du pognon et de la parité, par Bruno Liesse

D’après un autre média business, car MM relève bien de la trade press et du commerce, il fallait s’attendre à un "retour de flamme anti-durable". Le come back du court terme, du fric, de la détestation de l’autre dont la tronche, définitivement, ne me revient pas. On a essayé pourtant, depuis le Covid et même avant, de s’aimer à toutes les couleurs. De manger des panais verts et mauves bios, produits par le fermier d’à côté que vous aviez croisé pendant dix ans en vous en foutant. On a casté et ajouté des gens de toutes les ethnies (enfin, surtout une) dans nos pubs, histoire d’aligner les audiences vers un monde meilleur, où nous serions tous pareils, et tous barbant - mais pas barbus. Tout le monde était à pied dans le centre de Bruxelles, c’était merveilleux : comme un dimanche sans voiture permanent. Il ne manquait plus que des BBQ sur toute la rue du Midi, mais sans cochon, il faut pas exagérer non plus, et des pompes à bière belge le long du canal. Les ploucs et les bourgeois se tombaient dans les bras au bois de la Cambre, fermé aux SUV d’Uccle et Waterloo d’un côté, et ouverts  aux piétons des cultures mixtes remontant lentement des communes dites difficiles, d’un autre côté. Tous ensemble, même si on est différent. Le paradis sur terre, on pourrait en pleurer.

Et les entreprises de s’affairer à leurs programmes de sustainability de tous bords : mettez-moi un parc électrique, parlant des bagnoles, des fontaines à eau, des salades au frigo, et virez-moi les canettes, les poubelles, les imprimantes et mettez-moi le chauffage sur 19. De toutes façons, la moitié du staff est en télétravail le cul dans le sofa. Quelques panneaux solaires chinois plus tard, « un effet de balancier s’est opéré », dixit Trends. Les sociétés ont fait leurs comptes et l’inclusivité coûte plus chère que le produit de base. Tiens donc. « Tant au niveau du recrutement que de la productivité ». Buiten, les bras cassés. Pour les caisses hybrides, on découvre que derrière le montage fiscal, elles consomment nettement plus au global. Que vous mettez une heure de plus pour entrer dans Bruxelles. Les piétons sont retournés chez eux et les navetteurs travaillent de la maison - avec une productivité autant discutable que les profils bizarres en réinsertion. Donc déconfiture bio et écolo aux élections et montée des partis égocentriques à pensée unique. Mais ne le sont-ils pas tous, sauf ceux du centre du terrain, qui comme au foot, est un passage ne servant pas à grand-chose. 

Pour les médias et la pub, on ne sait plus où gratter pour se faire rire et récupérer du pognon : les fusions, et dans une moindre mesure car elles coûtent cher, les acquisitions se terminent. Un peu comme certaines guerres lorsque vous n’avez plus rien à détruire, dont deux cas d’actualité qui nous réveillent tous les matins (vous aussi, vous avez décidé de zapper le journal parfois ?). Et bien entendu que Zuckerberg se tamponne de la safety comme de Trump : il profite de l’occasion pour virer des dizaine de milliers de fast-checkers par économie. Et bien entendu que les deux groupes publicitaires américains qui se rapprochent visent les mêmes économies d’échelle et le dégraissage, ce projet a même un chiffre : $750 millions. Les optimistes diront que ce n’est pas confirmé et pas l’objectif, les autres diront qu’en effet, ce sera sans doute plus, et que c’est une conséquence, non une cause. De quoi ? De l’aplatissement du business, de la macro-économie mondiale, où tout le monde perd à part les grands actionnaires (c’est marrant, ça rime). Demandez à Carlos Ghosn ou plus récemment son copain du même prénom, Tavares. Vous dézinguez toute une multinationale et loin de parvenir en prison, on vous remercie à huit chiffres pendant que vos anciens généraux se font vider, ce qui est bien, tandis que le reste tente de sauver la maison. 

Rassurez-vous, la Belgique n’est pas la seule à se demander comment un jour - si un jour - elle parviendra à résorber sa dette. Celle des Etats-Unis frôle les $40.000 milliards, alors Donald me fait un peu sourire quand il excite les Bourses (c’est son but) et les médias en les allumant avec son petit $500 milliards pour booster ses projets d'IA et de captation de data illégale. Notez au passage que celle de la Chine est de 71 trillions ; je vous assure qu’ils ne rigolent pas non plus : leurs yeux bridés, c’est de naissance.

En conclusion, tout est question de pognon et on ne doit pas plus attendre le retour de petit Jésus que des OVNI quand on regarde le ciel. Ni des missiles nucléaires, ça c’est la bonne nouvelle. Et même Poutine l’a compris : pas de bras, pas de chocolat. Version géopolitique, pas de clients, pas de restaurant.

Alors quoi ? Alors on danse, comme le dit la chanson. 

L’année démarre toutefois sur une note de parité, bientôt. Celle de l’euro et du dollar. Ici aussi, tout le monde perd, comme quand on taxe des produits d’importation. Mais ceci n’est pas de la pub, c’est de la macro-économie. Sauf que pour retrouver les beaux jours, des indicateurs porteurs sont indispensables. Et à leur base, la volonté des dirigeants politiques et du privé, comme de chaque consommateur ou individu (« l’effet colibri », Pierre Rabhi), d’affirmer une pensée positive et de poser des actes qui visent au bien collectif. 

On dira que je suis gauchiste. On dit tant de bêtises, et moi en premier. Bon dimanche. Nous avons un gouvernement et du soleil, cela tombe bien. On attendait les deux depuis sept mois.

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