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Christophe Robyns (Agilytic) et Christophe Hendrick (Flying Fish): la data au coeur du Marketing Mix Modeling

Jeudi 23 Janvier 2025

Christophe Robyns (Agilytic) et Christophe Hendrick (Flying Fish): la data au coeur du Marketing Mix Modeling

La technique du Marketing Mix Modeling (MMM) n’a rien de nouveau mais semble gagner en popularité. C’est en tout cas le constat de Christophe Robyns et Christophe Hendrick, respectivement Managing Partner d’Agilytic et Lead Digital Strategist chez Flying Fish. Les deux entreprises ont récemment collaboré pour la réalisation d’une telle analyse pour un grand compte. Une occasion de soulever le capot de ces MMM.

Le casting

En activant les données des entreprises, Agilytic les aide à atteindre leurs objectifs. Une "data science agency" qui explore les données pour en extraire toute la valeur en exploitant la puissance des algorithmes, du machine learning et de son armée de data analysts.

Flying Fish est également experte en analyse de données mais plus particulièrement dans le domaine des media digitaux. Une "digital analytics agency" qui collabore avec des annonceurs et des agences médias pour les aider à optimiser la performance des campagnes.

Une complémentarité parfaite pour s’attaquer au défi que représente la réalisation d’un MMM.

L’objectif

L’ambition d’un MMM est de corréler les actions marketing avec les ventes de l’entreprise en intégrant les investissements médias - on et offline - en plus de différents paramètres ou "événements" tels que la saisonnalité des ventes propres à l’entreprise, une canicule, des tensions géopolitiques, sans oublier les conditions d’achat média. 
« Un MMM est un outil stratégique » précise Christophe Robyns. « Il offre une vue macro et permet d’avoir le recul nécessaire pour optimiser ces actions marketing, particulièrement les investissements médias, et ce canal par canal. »

En plus de proposer ces corrélations, le MMM est un outil dynamique que les équipes marketing peuvent interroger et grâce auquel ils peuvent tester des hypothèses d’investissement avant de les mettre en pratique.
Les paramètres

La mise en place d’un tel projet nécessite un certain niveau de budget media, de l’expertise data et la disponibilité d’un minimum de trois ans de données hebdomadaires, soit une base de 156 points de données.

Pour ce qui concerne le budget média, le MMM sera pertinent pour des annonceurs qui ont un volume d’investissement de l’ordre de 2 à 3 millions d’euros annuels. Simplement parce que les gains de productivité potentiels qui peuvent être réalisés grâce au MMM, doivent être suffisamment significatifs pour au minimum couvrir les frais de réalisation de l’étude.

Deuxième élément, l’expertise data qui mobilise nombre d’algorithmes, de processus de machine learning et de structuration de données. C’est ici qu’interviennent des spécialistes tels qu’Agilytic et Flying Fish qui disposent des compétences et de l’expérience nécessaire.

Enfin, dernier paramètre, crucial, la disponibilité et la qualité des données. C’est clairement le point clé qui détermine la faisabilité d’un tel projet.

Le cœur du réacteur

Si les données clients sont généralement disponibles, les données médias sont souvent dispersées entre les différentes agences de l’entreprise et ses propres équipes. 
« Cette problématique est encore plus complexe si l’annonceur a changé d’agence et qu’il n’a pas pensé à récupérer ses données et à les sauvegarder » détaille Christophe Hendrick.

Il constate aussi que la disparition des cookies tiers et le développement des first party data génèrent une nouvelle vague de données.
L’autre écueil est la dispersion des données entre les différents départements de l’entreprise. Cela implique des collaborations inédites entre des équipes qui n’ont pas toujours l’habitude de travailler ensemble.

Les data, un patrimoine méconnu et inexploité

Nos deux interlocuteurs s’accordent sur l’importance de ce concept du « patrimoine data » pour les entreprises. Christophe Hendrick : « Cette notion n’existe pas encore en entreprise. Elles n’ont pas toujours ou par encore conscience de sa valeur et de l’intérêt d’y porter attention pour l’enrichir et l’exploiter. » Et son complice de préciser qu’il y a au sein des entreprises encore beaucoup d’interrogations sur les données : comment les récolter, comment les utiliser et l’impact qu’elles peuvent avoir. « Les systèmes existent parfois et récoltent plein de données mais elles ne sont pas toujours exploitées par manque de stratégie data ».  Situation courante dans les PME à l’inverse des grandes entreprises, largement converties au data management.

La conséquence est que l’identification des sources de données, leur collecte et leur traitement monopolise près de 60% du temps nécessaire à la mise en place d’un MMM, ce qui est considérable. D’autant que si certaines données sont structurées et accessibles via des API, d’autres se trouvent dans des tableaux Excel, des slides de présentation voire des emails.

Une approche itérative

En combinant toutes les contraintes et les paramètres, la mise en place opérationnelle d'un MMM demande généralement quelques mois de travail pour le développement des modèles et la formation des équipes sur les scenarii mis en place. « C’est un travail itératif réalisé en étroite collaboration avec les équipes du client », constate Christophe Robyns. L’objectif étant que celles-ci puissent exploiter le modèle et le faire évoluer en interne.

Une fois en place, l’étape suivante est sa mise à jour pour vérifier l’efficacité des changements effectués dans la répartition des investissements. Leur impact ne se mesurent pas sur le court terme : les mises à jour sont effectuées 3 à 6 mois après la mise en place originelle. Et même s’il est théoriquement possible d’automatiser ces mises à jour, « la limite est la disponibilité et l’accessibilité des données, particulièrement pour les médias offline », rappelle Christophe Hendrick.

Entre technologie et artisanat

Le paradoxe du développement d’un MMM, pourtant largement basé sur la tech, est que cela reste un projet artisanal qui nécessite beaucoup d’interventions humaines. La difficulté à récolter les données implique de poser des hypothèses et même si les IA génératives peuvent s’avérer très efficaces pour son élaboration, l’expertise combinée du client et des prestataires reste fondamentale.

C’est la conclusion de l’expérience de nos deux experts qui notent que la disparition des cookies tiers commence à générer un certain stress chez les annonceurs et les agences médias qui se tournent dès lors de plus en plus vers ce type d’analyses.

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