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Julie Marinower (DEI Activist, D'Ieteren): "Devenons tous des Bertha Benz !"

Samedi 1 Février 2025

Julie Marinower (DEI Activist, D'Ieteren):

S’il y a un secteur où la diversité, notamment en matière de genre, pourrait s’améliorer sensiblement, c’est bien dans celui de l’automobile. De par son rôle de pionnier dans divers domaines, D’Ieteren a décidé il y a trois ans déjà de mettre les bouchées doubles sur le sujet de la diversité et de l’inclusion. 

Entretien avec Julie Marinower, Internal & External Communication Manager et DEI Activist chez D’Ieteren, qui nous parle de la mission de l’entreprise avec perspicacité et enthousiasme.

Le secteur automobile n’est pas très attrayant pour les femmes. C'est l’une des premières choses que vous nous ayez confiées. Pourquoi ? 

Selon des études, l’automobile est perçu comme un secteur où il n’y a pas de place pour les femmes, où il y a peu de flexibilité, peu d’attention pour l’équilibre entre vie privée et professionnelle. Mais le principal critère, c’est le manque de diversité. De nos jours, les chercheurs et chercheuses d’emploi examinent de plus en plus les efforts des entreprises notamment en la matière avant de s’engager. Nous avons réalisé chez D’Ieteren que nous pouvions clairement en faire plus. 

Comment ?

Nous avons décidé de nous focaliser sur quatre piliers : le recrutement, le développement, la rétention et l’éducation. Nous avons commencé par créer des dashboards pour avoir des bases chiffrées en matière de diversité. Cet outil nous a permis d’avoir une photo en temps zéro afin de pouvoir observer les évolutions au fil du temps et de nos actions. 

Au niveau du recrutement, nous avons voulu connaitre la différence entre le nombre de femmes qui postulent, la proportion de CV féminins retenue, et combien d’entre elles sont effectivement recrutées. La bonne nouvelle, c’est que la proportion est linéaire et que nous ne perdons pas de femmes en cours de route. En 2024 par exemple, nous avons complètement revu notre site carrière. D’Ieteren et son réseau ont également lancé une campagne sous la devise "Attracting Technical Talent", avec l’objectif de recruter des talents techniques et, au passage, d’attirer plus de femmes en mettant en scène des "role models" féminins, sachant que le pouvoir d’identification est important, comme l’ont démontré plusieurs études. Nous planifions d’autres actions au niveau du recrutement.

En ce qui concerne le développement et afin de soutenir le potentiel de chacun, nous avons décidé de créer un programme de leadership, d’abord pour les femmes, mais aussi pour les hommes. Depuis le début, la formation a déjà accueilli 150 participants.

Pour le pilier rétention, nous avons par exemple lancé en 2022 notre "Employee Experience Survey" dans laquelle nous avons demandé à nos employés pour la première fois ce qu’ils pensaient de la diversité chez D’Ieteren et ce qu’ils aimeraient voir changer. 

En matière d’éducation, si nous avons lancé un e-learning pour offrir à tous et toutes les bases sur le sujet, nous mettons surtout un point d’honneur à plus communiquer. Nous organisons par exemple des événements comme des "lunchs & learns", qui stimulent l’échange et les discussions. 

Cet aspect est primordial : une entreprise, c’est un peu le reflet de ce qui se passe en société ou dans une famille. Il y aura toujours la nièce qui voudra discuter de diversité, le tonton qui ne veut plus en entendre parler, la grand-mère qui se demande pourquoi c’est un sujet et les parents qui ne veulent pas de dispute… Le dialogue est donc un must.

Dans ce contexte, nous avons par exemple signé aussi un partenariat avec Open@Work, une organisation faîtière regroupant des entreprises et des organismes qui militent activement pour des politiques d’inclusion en milieu de travail pour la communauté LGBTQIA+ et ses alliés. Les 44 entreprises signataires s’engagent à être accueillantes, inclusives et ouvertes à la discussion. 

Quels sont les résultats tangibles de votre mission ?

L’awareness autour de la diversité a augmenté. Nous avons créé un réseau de femmes, Ladies in Motion : il y a eu deux rencontres en 2024 avec 150 participantes pour chaque édition. Bien sûr, il y a encore du travail : le changement prend du temps.: La diversité n’est pas un projet mais bien une réalité et nous continuons à mettre des choses en place. 

Nous le voyons tous les jours, la société se polarise, avec d’un côté les entreprises qui font marche arrière en matière de DEI et de l’autre ceux qui voudront stimuler la diversité comme une nouvelle valeur. C’est à nous d’être les acteurs du changement, tout en gardant en tête que tout le monde n’est pas au même niveau en matière de diversité. Il faut donc faire preuve d’empathie, de bienveillance et de pédagogie pour se tendre la main et créer des "safe spaces" de discussion. 

ll ne faut pas attendre d’avoir une équipe complète pour agir. Chacun devrait se lancer sans tarder afin de promouvoir la diversité. Prenons l’exemple inspirant de Bertha Benz, épouse de l’inventeur automobile Carl Benz. En 1888, elle devient la première personne en Allemagne à parcourir une longue distance en automobile, surmontant seule de nombreux obstacles mécaniques. Avec ingéniosité, elle utilise une épingle à chapeau pour déboucher un conduit et une jarretière pour isoler un câble... Devenons tous des Bertha Benz : osons, avançons, laissons nos peurs de côté ! Si chacun adoptait cet état d’esprit, il n’y aurait plus besoin de programmes DEI, la diversité s’imposerait d’elle-même.

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