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Christian de La Villehuchet (Havas Group) : "L'intégration de l'homme dans la chaîne du travail restera"

Mercredi 3 Juillet 2024

Christian de La Villehuchet (Havas Group) :

Il a passé plusieurs années à Bruxelles, même s’il n’y était « que 3% du temps », le Global Chief Integration Officer chez Havas Group, qui est aussi Global Business, assure la présidence de l'EACA (European Association of Communication Agencies). Autant dire que son point de vue donne un certain recul sur les Lions, la publicité et le marché devenu, plus que jamais, mondial.

Nous l’avons rencontré au Havas Café.

Quelle est votre impression générale cette année ? On y parle beaucoup américain, ne trouvez-vous pas ?

Ce n’est pas tant la question d’une forte présence US, le marché est de plus en plus international. Et un grand nombre de holdings propriétaires des marques globales sont américaines. Mon autre impression est la domination de l’IA dans les conversations. C’est la double tendance.

Voyez-vous un lien entre les deux ?

Oui, le "content at scale", voulant dire la possibilité de centraliser et décliner de façon pertinente les campagnes, mais à partir d’un maximum d’assets. L’IA et les programmes de DCO peuvent vous permettre de coordonner au mieux des messages quasi-personnalisés, dans les bons contextes et au bon moment. Et ceci, par pays. Cela nécessitait une très bonne compréhension des cibles et via la data mais aussi les moyens techniques pour déterminer les meilleurs canaux et moments. Aujourd’hui c’est possible grâce à la combinaison de l’intelligence et de la tech.

D’un point de vue organisation, les filiales doivent-elles s’inquiéter, eu égard à cette centralisation des exécutions ?

Pour les multinationales, il n’est pas nouveau que les sièges tentent de globaliser ce qui est possible et nécessaire. Mais elles doivent disposer de hubs forts, c’est-à-dire de groupes de pays réunis dans des "clusters". Là, il sera indispensable d’avoir les ressources efficaces suffisantes, dont des collaborateurs qui viendront de tous les pays de la région. Le local pur restera justifié pour un grand nombre d’annonceurs. Ici nous parlons des marques globales : si elles comptent pour beaucoup en budgets investis, en nombre, ce type de clients est limité.

Il reste donc un gros marché local pour les plus petits annonceurs ?

Certainement. Nous avons deux vitesses à nos services, et dans un pays comme la France, le local est une économie en soi ! Je conçois qu’en Belgique ce soit moins clair, mais chaque pays détient une structure à deux vitesses avec des entreprises de taille moyenne qui représentent une grande partie de l’activité et des emplois. Le pilier économique à la base reste assuré par les PME.

Le nouvel operating system de Havas ne s’adresse qu’aux grands headquarters ?

Non. Notre groupe est adapté aux deux demandes. Nous voulons justement faire bénéficier les clients locaux des services et outils développés au niveau du groupe, pour les grands annonceurs. Vouloir développer des messages sur mesure et interactifs avec les audiences basés sur de la tech dernier cri, par exemple, est une démarche de marketing applicable à tous.

Vous êtres président de l’EACA, est-ce aussi un message pour toutes les agences, y compris locales et indépendantes ?

Oui, d’ailleurs les marques locales préfèrent travailler avec des partenaires locaux. Ce qui est logique, et pas uniquement dans une forme de protectionnisme : tout est à l’échelle. Il faut rester optimiste et combatif, c’est comme pour l’IA. Vous savez, pour l’instant, elle ne génère pas grand-chose toute seule : l’humain reste indispensable ! L’intégration de l’homme dans la chaîne du travail restera. L’Intelligence Artificielle a été créée ex-nihilo. Et les traces d’IA sont détectables dans ses exécutions. Les Chinois disent : "The expected is the ennemy of the effective". Beaucoup d’innovations relèvent du possible, n’oublions pas de travailler avec nos certitudes.
 

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