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Philippe Andrianne et Thierry Desmedt (JCDecaux): "En tant que leaders, nous jouons un rôle crucial dans le développement du marché et dans l'apport d'innovation"

Dimanche 21 Avril 2024

Philippe Andrianne et Thierry Desmedt (JCDecaux):

Le média d'affichage connaît un essor remarquable, porté par l'augmentation des écrans numériques et la montée en puissance de l'achat programmatique. Ces évolutions sont notamment soulignées par le rapport annuel de JCDecaux, le leader mondial de la communication extérieure.

Nous avons rencontré Philippe Andrianne et Thierry Desmedt, co-CEO de la filiale BeLux du groupe, depuis le départ de Wim Janssen pour DPG Media en septembre dernier. 

Philippe Andrianne est présent chez JCDecaux depuis 15 ans et anciennement CFO, et Thierry Desmedt, davantage focalisé sur le commercial, est arrivé en 2022 après avoir passé 17 ans chez P&G et dirigé EssilorLuxottica Benelux pendant 10 ans.

Pour la deuxième année consécutive, le groupe enregistre des progressions impressionnantes. Cette évolution est-elle similaire sur le marché belge ?

Thierry Desmedt : Elle est même meilleure, notre croissance dépasse celle du marché. La bonne santé de l'OOH est due à plusieurs facteurs, notamment le ralentissement de la publicité en ligne, impacté encore davantage par la fin des cookies tiers et la protection des données. L'hyper ciblage a été en vogue pendant des années, mais les annonceurs réalisent désormais qu'ils ont également besoin d'atteindre une audience large… Un rééquilibrage est en cours.

Et si la publicité en ligne stagne, l'affichage numérique est très bien perçu par les annonceurs et les consommateurs. Le numérique représente désormais près d'un tiers du total de l'affichage et a connu une croissance de 27%, comme le montrent les chiffres de l'UMA. Le pDOOH, mode d'achat programmatique, est le segment connaissant la plus forte croissance ; il représente désormais 23,5% des ventes totales de DOOH. Chez JCDecaux, nous encourageons la numérisation et l'utilisation des données depuis plusieurs années.

La numérisation est-elle un moteur essentiel pour le groupe ?

La croissance du chiffre d'affaires du groupe au niveau mondial est de 7,6% et celle du segment DOOH de 21%. Ce dernier représente maintenant plus de 38% des revenus. Le chiffre d'affaires de la plateforme VIOOH a augmenté de 63,5%. L'écosystème programmatique DOOH continue de se développer, soutenu par le dynamisme et le nombre croissant de DSP connectées à VIOOH dans le monde.

En Belgique, nous avons triplé le nombre d'écrans numériques en trois ans. On compte aujourd'hui 500 écrans dans les rues, 750 dans le secteur du retail - chez Carrefour, Delhaize et dans 32 centres commerciaux -, 160 dans le métro et 65 à l'aéroport. L'année dernière, nous avons ajouté 20 écrans à des emplacements stratégiques au cœur de Bruxelles. 250 écrans sont disponibles dans les 19 communes bruxelloises.

Quelle est la proportion d'écrans par rapport aux panneaux ?

Philippe Andrianne : Elle varie considérablement selon le secteur. Les centres commerciaux et le retail sont entièrement numérisés, tandis que dans les rues, sur 12.000 faces, environ 500 sont numérisées.

Cette tendance à la numérisation va-t-elle s'intensifier ?

Oui, car la numérisation apporte une valeur ajoutée à toutes les parties prenantes : flexibilité pour les annonceurs et plus d'espace et de temps de communication pour les communes. Elle permet également un enrichissement du média grâce aux données.

Le marché s'oriente donc clairement vers la numérisation, comme le démontrent tous les indicateurs. Le retour sur investissement est significatif par rapport au coût du média, et le programmatique, encore à ses débuts en Belgique, est un réel moteur. Tout est en place pour une évolution continue.

Cela fait partie d'une stratégie globale. L'une des particularités de JCDecaux est notre capacité à interagir avec nos différents univers, guidant le consommateur à travers eux en fonction des objectifs de la marque. Nous sommes présents tout au long du parcours du consommateur, sur tous types de formats : des billboards aux panneaux Insert dans les commerces de proximité, en passant par les réseaux 2m2 dans les rues, les centres commerciaux et chez les grands distributeurs. Nous accompagnons la marque et le consommateur du matin au soir, jusqu'à l'acte d'achat. Cette présence continue est l'une des clés de notre succès, nous différenciant des autres acteurs OOH sur le marché Belge.

Quels segments ou produits performent le mieux ?

Thierry Desmedt : Le mobilier urbain continue de connaître une forte croissance. Mais nous observons également un intérêt considérable des annonceurs pour les centres commerciaux. C'est un segment très attractif pour les consommateurs. Lorsqu'il se rend dans un centre commercial, il est beaucoup plus réceptif aux messages publicitaires, étant dans un état d'esprit d'achat. Le temps d'exposition à une publicité est également plus long dans ce type d'environnement, ce qui stimule la croissance du secteur.

Concernant les aéroports, le groupe a récemment lancé une offre programmatique internationale incluant l'aéroport de Bruxelles-National...

Philippe Andrianne : C'est une première dans le secteur. Cette offre permet aux marques et aux agences de déployer des campagnes dynamiques, ciblées et contextualisées dans les aéroports gérés par JCDecaux (150 dans le monde) et disponibles en programmatique, via la SSP VIOOH et de nombreuses DSP. Elle donne accès à plus de 70 millions de passagers par mois, générant près de 2 milliards de vues sur un réseau de plus de 3.000 écrans dans les principaux aéroports. Initialement, l'offre concerne 15 des aéroports les plus fréquentés au monde, y compris Bruxelles, déjà disponible en programmatique depuis 2022.
Bruxelles n'a pas encore atteint le pic d'affluence de 2019, mais sur le plan publicitaire, une accélération est déjà observable depuis le début de l'année, avec le retour de certains annonceurs. Notre nouvelle offre devrait stimuler cette tendance.

De même, l'étude que nous avons réalisée avec Ipsos sur les différents profils de passagers, leur relation avec l'univers aéroportuaire et leur perception de la publicité dans les aéroports confirme l'intérêt d'une audience premium, plus jeune et aisée que la moyenne.

Thierry Desmedt : En parlant de transport, il est important de mentionner le travail considérable effectué dans les métros après la pandémie, pour compenser la légère baisse de trafic due au télétravail. Nous sommes dans le business de la monétisation du trafic. Nous vendons de l'audience et du temps, pas seulement des faces. Cet univers est également propice à la communication de masse avec une attention accrue des consommateurs et une plus longue exposition au message de la marque.

Qu'en est-il de la technologie et de la créativité ? Nous voyons de plus en plus de dispositifs immersifs en 3D, en grand format. Quelle est la situation en Belgique ?

Nous avons exploité ces technologies lors des Plaisirs d'hiver, avec des dispositifs permettant au produit de sortir de l'écran. Trois écrans Deep Screens ont été installés à des emplacements stratégiques. Les contenus développés étaient uniques et conçus spécifiquement pour ces écrans. Lego, Gin Hendrick's et Euro Millions, entre autres, ont utilisé ce dispositif.

Par ailleurs, la station Louise à Bruxelles est totalement immersive, offrant de la réalité augmentée. Vous avez sûrement vu la dernière campagne Samsung… La station est équipée d'un écran LED impressionnant, visible des deux côtés des quais, capable de diffuser du contenu traditionnel au format 16/9. De plus, pour les plus créatifs, il est possible d'utiliser l'écran en 3D et de dominer la station avec du stickering. Il y a un véritable engouement pour la créativité et l'innovation. Nous prévoyons de renforcer notre équipe de Solutions Créatives pour promouvoir cette dimension de notre offre de communication.

À l'aéroport, nous commençons également à proposer de la 3D sur des écrans plats. Il y a un réel potentiel, mais pour être efficace, cela doit être associé à un ROI significatif pour l'annonceur et couplé avec du mass media.

La responsabilité sociale et environnementale est-elle également une thématique importante chez JCDecaux ?

Philippe Andrianne : Absolument, c'est une priorité depuis la création du groupe en 1964. L'objectif initial était de créer, installer et entretenir des infrastructures publiques et de transport, offrant des services utiles et innovants, financés par la communication extérieure. Cette vision s'est ensuite concrétisée, dès 2014, par une approche globale de responsabilité environnementale, sociale et sociétale.

Depuis 2015, nous sommes également partenaires officiels des Nations Unies et contribuons à 14 de ses 17 Objectifs de Développement Durable. Des résultats attestés par des standards internationaux comme MSCI ESG, EcoVadis et FTSE4Good. Une nouvelle stratégie a également été lancée en 2022 avec pour ambition des réductions drastiques des scope 1, 2 et 3 d’ici à 2030, visant le net zéro carbone pour 2050 et la maîtrise des autres impacts environnementaux tels que la gestion des déchets, consommation d'eau responsable, protection de la biodiversité, etc.

Quels sont vos défis à court et moyen terme en Belgique ?

Thierry Desmedt : Nous devons continuer à sensibiliser le marché : l'OOH représente près de 10% des investissements médias en Belgique, mais sa part pourrait augmenter jusqu'à 13% ou 14%. En tant que leaders, nous avons un rôle essentiel dans cette éducation au média et dans l’amélioration constante de nos services dans l’intérêt des marques mais également des collectivités.

Philippe Andrianne : Tout cela participe à notre approche du marché : démontrer nos innovations, la valeur ajoutée de nos supports, leurs performances, l'accessibilité en termes de coûts par rapport à d'autres médias et, bien sûr, notre rôle sociétal.

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