A l'instar de
La Libre Network - qui mêle plateforme participative, club digital et intelligence collective -, de la refondation de la régie ou de la diversification dans les médias dits de services, les projets actuellement portés par le groupe IPM s'inscrivent résolument dans les technologies. Avec un objectif clair : accompagner et soutenir la transformation numérique des entreprises clientes. Comme l'explique François le Hodey, CEO du groupe, dans le long entretien qu'il nous a accordé et dont vous retrouverez l’intégralité dans le prochain numéro du magazine MM.
Commençons par le bilan 2017. Quel regard portez-vous sur l’année qui s’achève ?
Au niveau d’IPM Group, c’est une année à nouveau de croissance grâce à nos activités de développement. Ce qui est très positif, c’est l’installation progressive du modèle de la presse digitale payante, la croissance de nos audiences digitales, le très bon CIM pour La Libre, le succès grandissant de betFIRST, la transformation de notre régie en une "marketing factory", la prise en régie des sites de la RTBF et DH Radio qui s’installe dans son segment de radio musical-info pour jeunes adultes.
Sur le plan publicitaire, c’est une année perturbée, nous ne réalisons pas suffisamment combien la révolution numérique déstabilise tant les médias que les annonceurs. Tous les business models sont en train de changer, et le couple annonceurs-médias peine à se resynchroniser.
Un nouvel équilibre doit s’établir. Il y a eu un rush vers les médias digitaux, avec une obsession sur les prix plus que sur l’efficacité marketing. Toute la profession a besoin d’une approche plus réfléchie, avec un mix média bien pensé entre le digital et les médias dits traditionnels. A chaque média correspond des segments de consommateurs, il faut être hyper présent sur Internet, tout comme il faut continuer à communiquer auprès des consommateurs qui ne sont pas ou peu sur Internet. On constate d'ailleurs que les solutions NP nationales rencontrent un vif succès.
Comment évolue le marché lecteurs ?
En ce qui nous concerne, l’aspect le plus positif est clairement l'augmentation du payant digital. C’est une tendance lourde. Nous sommes en croissance exponentielle sur le nombre d’abonnés digitaux. Je crois que l’idée de payer un prix raisonnable pour obtenir un accès à une information de qualité, et différents services autour de cette information, est en train de se généraliser. C’est une évolution très positive qui va nous permettre de retrouver un modèle vertueux. IPM est très concentré là-dessus. Nous sommes devenus une vraie entreprise d’e-commerce d’informations.
Ces deux éléments - le besoin des entreprises de se resynchroniser et l’évolution des groupes de presse - impactent la manière dont évolue le travail des régies. On le voit dans la nouvelle organisation mise en place au Persgroep, notamment. Quelle est votre vision en la matière ?
Les annonceurs attendent de nous un vrai travail de compréhension de leurs besoins en communication. Et une capacité d’offrir des solutions qui délivrent des résultats concrets par rapport à ces besoins. En d’autres mots, nous ne pouvons plus nous contenter de vendre uniquement notre inventaire. Nous devons être à même à la fois de comprendre les besoins de nos clients et d'étendre notre gamme de produits et solutions afin de leur apporter plus d’efficacité. Dans cet esprit, nous travaillons énormément sur l’inbound marketing, nous packageons des solutions de SEA, de SEO, de native advertising ou de stimulation des ventes par des opérations particulières… Il faut vraiment partir des besoins de l’annonceur.
Cela sous-entend des contacts plus directs avec lui ?
Les agences doivent comprendre qu’il est dans leur intérêt de mieux travailler avec nous. Si nous ne faisons que pousser des solutions standardisées, il ne faudra pas s’étonner qu’il n’y ait plus que des machines. Or, ce n’est pas inéluctable. Il y aura un marché des commodities, avec des prix bas, et un marché des specialities, offrant plus d’impact, un meilleur timing, un mix de créativité tant dans le message que dans la manière de faire passer ce message.
C’est là que réside notre force. En ce sens, la taille n’est pas l’enjeu le plus fondamental. Le plus important et le plus difficile, c’est la qualité des solutions proposées et cela implique une révolution quasi copernicienne de la part des régies.
Nous avons un plan en interne, baptisé K2, du nom du sommet le plus difficile à escalader au monde. C’est un énorme défi. Pour escalader le K2, il faut être extrêmement motivé, bien préparé et maitriser beaucoup de techniques…
De quelle manière s’incarne ce plan ?
Par des changements structurels au sein de notre organisation commerciale. Nos vendeurs ont pour première mission de comprendre les besoins des annonceurs, ensuite la gamme des solutions qu’ils peuvent présenter s’est élargie avec toute une gamme de leviers d’inbound marketing, enfin, les clients sont dorénavant suivis par un account manager afin de travailler sur la performance. Dans cette transformation fondamentale, la régie devient une sorte de "marketing factory".
On a assisté ces derniers mois à des rapprochements, partenariats et rachats importants dans le secteur de la presse belge. Le groupe IPM est-il en recherche d’alliances ?
Nous avons une alliance commerciale qui fonctionne très bien avec Mediahuis pour les campagnes nationales et nous avons confié DH Radio et les vidéos sur nos sites news à RMB. Nous avons aussi des produits communs avec Pebble. Pour ce qui est du marché francophone, la question de la consolidation reste ouverte.
Vous ne considérez donc pas que la messe est dite à ce niveau-là ?
Il y a un accord commercial entre Rossel et l’Avenir, mais la question de la consolidation est ouverte.
Vous iriez au-delà d’un accord commercial ?
C’est la révolution numérique qui impose le rythme, et comme on dit en anglais, "the clock is ticking" ! Il serait logique de poursuivre les consolidations pour que nos entreprises aient la taille critique suffisante face aux investissements à réaliser. Aujourd’hui les cartes sont chez Nethys, à eux de définir leur vision stratégique en matière de presse.
Côté IPM, nous représentons 35% du marché, nous investissons depuis 17 ans dans la révolution numérique, notre modèle est en voie de complète transformation, les complémentarités entre l’Avenir et IPM sont évidentes, un très beau projet pourrait se mettre en place, créateur d’emplois et de valeur ajoutée régionale. Vu que nous avons peu de déduplications, nous serions plus dans une stratégie de complémentarité, c’est là que réside l’attractivité pour toutes les parties d’un tel projet.
Maintenant, c’est quelque part le monde politique qui a la clef, et c’est une évidence qu’un marché 50/50 entre deux éditeurs est mille fois plus vertueux et stable sur le long terme, qu’un marché 70/30. Ici les enjeux économiques et démocratiques sont alignés.