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B Corp, une autre approche du business

Jeudi 27 Février 2025

B Corp, une autre approche du business

Rêvons ensemble d’un monde meilleur. Autrefois baseline d’une campagne qui serait maintenant politiquement incorrecte, c’est aujourd’hui un mantra qui encourage les entreprises à accroître leur impact social et durable. Pour homologuer les résultats de ces nobles efforts, l’organisation à but non lucratif B Lab a conçu la certification B Corp. 

Rencontre avec Tessa van Soest (Executive Director de B Lab Benelux - photo) et Emma Van Zundert (Belgium B Corp Coordinator), invitées par Sammy Colson et Christophe Mes, respectivement CEO et Chief of Staff de Springbok, qui a récemment obtenu la certification.

Tout le monde a déjà entendu parler de B Corp, mais pour qui ce ne serait pas le cas, que signifie exactement ce terme et d’où vient-il ?

Tessa van Soest : B Corp est un service offert par B Lab, une organisation mondiale à but non lucratif d’origine américaine qui vise à créer un changement systémique afin d’évoluer vers une économie régénérative, durable et équitable. La certification B Corp est un horizon et un objectif pour soutenir le comportement des entreprises dans la bonne direction. Mais B Lab ne se contente pas de certifier les activités durables des entreprises : le groupe se penche également sur les lois et les réglementations afin de les faire évoluer par le biais du lobbying et de l’advocacy. Nous nous considérons avant tout comme un catalyseur de changement systémique positif.

Pourquoi était-il important pour Springbok d’obtenir la certification B Corp ?
Sammy Colson : Nous avions un jour défini les caractéristiques auxquelles Springbok doit répondre. Nous voulions notamment bâtir une entreprise qui permette à ses clients de réaliser une croissance positive et construire une entreprise qui existe encore dans 100 ans. Nous réfléchissons donc à long terme. La certification B Corp s’inscrit dans la lignée de cette vision et la rend explicite à l’intérieur et à l’extérieur de notre société.
 
En même temps, le parcours est aussi une forme d’engagement, puisque les entreprises doivent s’engager statutairement à contribuer à un monde meilleur pour tous aux niveaux social et écologique. 

La certification B Corp représente donc tout un processus. Quelle fut la plus grande difficulté rencontrée ?

Christophe Mes : Springbok n’est pas l’entreprise la plus simple qui soit en raison de nos différentes entités. Nous avons donc d’abord déterminé avec B Lab quelles unités seraient couvertes par la certification. Ensuite nous nous sommes penchés sur les 200 questions à compléter qui passent au peigne fin l’organisation jusque dans ses moindres détails. Au menu : les conditions de travails de collaborateurs, l’infrastructure de l’entreprise, la collaboration avec les clients et les fournisseurs, etc. Mais aussi l’impact sur les consommateurs et sur le monde qui nous entoure via nos campagnes. Nous avons bien fait de collaborer avec un consultant externe pour cette partie.

Qu’est-ce que B Corp a changé ?

Sammy Colson : Le processus de certification B Corp nous a aidés à définir la ligne et les engagements communs pour tout le monde au sein de notre structure. Nous sommes également devenus très critiques quant aux choix de nos clients. À cet égard, nous disposons désormais d’une boussole pratique. Celle-ci compte trois catégories : A, B et C. Dans la catégorie A, on retrouve les sociétés pour lesquelles nous pouvons toujours travailler ; dans la catégorie C, celles qui sont exclues par définition, parce que leurs activités ne pourront jamais contribuer à la construction d’un monde meilleur. ‘B’ constitue la catégorie intermédiaire, avec les entreprises que nous pouvons soutenir dans leur transition positive.

Tessa van Soest : Il y a beaucoup à gagner dans le groupe intermédiaire. C’est là qu’en tant qu’agence B Corp que vous pouvez contribuer à accélérer la transition, en enseignant à ces clients les outils nécessaires.

Sammy Colson : La certification nous a également aidés à définir précisément la façon dont nous envisageons certaines choses. Prenons l’exemple de l’IA : Springbok veut aller très loin dans ce domaine, mais nous avons décidé dès le premier jour de l’aborder de manière éthique. Je veux dire par là que nous ne nous contentons pas de suivre ce hype sans réfléchir. Une autre question concerne la façon dont nous considérons les médias. Devons-nous nécessairement passer par les big tech ? Ne vaudrait-il pas mieux annoncer au niveau local ? En d’autres termes, nous examinons d’un œil critique l’évolution du marketing, sans suivre aveuglément la dernière tendance à la mode.

La Belgique compte aujourd’hui environ 110 entreprises B Corp. Quelles sont les priorités de B Lab à court et long termes ?

Emma Van Zundert : Nous voulons que notre communauté soit aussi diversifiée que possible, avec une répartition géographique aussi large que possible. Actuellement, les entreprises certifiées se trouvent principalement à Bruxelles, mais nous évoluons : nous nous développons en Wallonie et en Flandre, et nous voulons poursuivre dans cette voie. Nous voulons également être représentés dans le plus grand nombre possible de secteurs différents. Les entreprises manufacturières sont maintenant de plus en plus nombreuses, par exemple. C’est une bonne chose, car la réflexion éthique dans la conduite d’une entreprise devient ainsi de plus en plus la norme. 

À cette fin, nous organisons notamment des community events pour les sociétés B Corp pour qu’elles partagent leurs connaissances. Toutes nos entreprises ont leurs propres chevaux de bataille, et si on en fait un sujet de discussion, on voit émerger une vision différente de ce qu’est une entreprise prospère. C’est ainsi que l’on passera d’une communauté à un mouvement.

Tessa van Soest : Par ailleurs, la septième version de la norme verra bientôt le jour. Nous adaptons donc le mode de calcul des scores pour l’obtention de la certification. Pour le moment, une entreprise doit obtenir un total de 80 dans les cinq domaines d’impact que nous examinons (gouvernance, environnement, employés, communauté et clients). À l’avenir, elle devra obtenir un score minimum dans chacun des cinq domaines. Nous ajoutons également de nouvelles normes, notamment en matière de droits humains et de circularité. La barre sera aussi placée plus haut. L’amélioration deviendra une obligation : l’entreprise sera tenue de parfaire son processus de performance management. Ce n’était jusqu’à présent qu’une recommandation, pas une obligation.

Un dernier mot ?

Christophe Mes : Prévoyez suffisamment de temps pour ce processus - en principe un an, compte tenu de tout le travail préparatoire. Et faites-vous épauler par un consultant pour la mise en pratique.

Sammy Colson : B Corp est passé d’un concept environnemental à quelque chose de beaucoup plus vaste. Il ne s’agit pas seulement de l’environnement, mais aussi de ce qu’une entreprise peut apporter à la société. En tant qu’entrepreneur, je veux que mon entreprise soit rentable. Elle doit l’être pour assurer sa survie. Mais dans le même temps, je considère qu’il est de ma responsabilité de participer à la société. En ce sens, B Corp n’est pas un simple ‘nice to have’.

Tessa van Soest : Voyez comment votre entreprise se situe par rapport à la norme actuelle, comment vous pouvez faire partie de la solution plutôt que du problème. Ouvrez le B Impact assessment : vous y recevrez d’emblée un feedback clair. Et engagez la discussion avec vos collaborateurs pour démarrer le processus. 

 

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