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"Imaginez un pays démocratique, où la presse n'est plus distribuée du jour au lendemain... C'est impensable !"

Dimanche 25 Février 2024

« Les annonceurs se posent des questions ; ils sont inquiets, à la fois comme annonceur et lecteur, mais nous voulons rassurer le marché publicitaire : d'une manière ou d'une autre il y aura une continuité de service après le 1er juillet. » Thierry Hugot, Chief Commercial & Marketing Officer du groupe Rossel, évoque évidemment l’épineux dossier lié à l’avenir de la distribution des journaux.

Un dossier qui a fait couler beaucoup d’encre - à juste titre, tant les enjeux sont multiples - mais qui jusqu’ici n'avait pas encore trouvé d’échos auprès du marché pub. Raison pour laquelle, en concertation avec IPM, Rossel a pris l’initiative de nous tenir informés des évolutions récentes de ce dossier aussi sensible que compliqué.  
 
« Imaginez un pays démocratique, où la presse n'est plus distribuée du jour au lendemain… C'est impensable ! », préface Thierry Hugot.
« Nous voulons rassurer le marché publicitaire, expliquer pourquoi le papier est important d'un point de vue sociétal, démocratique et économique. Le modèle économique sur lequel nous travaillons est celui d’un journal distribué à un coût de revient homogène sur l'ensemble du territoire. Nous discutons avec toutes les parties prenantes afin d'organiser une transition beaucoup plus structurée que ce qui a été décidé à la mi-décembre », résume Olivier De Raeymaker. 
Le Directeur du Soir se réjouit d’avancées récentes au niveau du gouvernement et des rencontres entre les quatre éditeurs avec les vice-premiers ministres : « Aujourd'hui, le politique nous écoute. »
 
Voulant dire que l’on peut envisager une remise en cause de la fin de la concession ? « Probablement pas au niveau de la décision en tant que telle, mais sans doute au niveau de ses modalités d'application, nous l’espérons… Mais il n'y a que De Croo qui puisse vous répondre. » 
 
Olivier De Raeymaker replace le contexte : « En année pleine, ce sont 176 millions de journaux qui sont distribués en Belgique. Soit 600.000 chaque jour. Si l'on se base sur les derniers chiffres CIM, ce sont près de 2,9 millions de Belges qui lisent un journal papier tous les jours. Chiffres auxquels nous devons ajouter les ventes au numéro, même si ceux-ci sont en décroissance... Le papier a peut-être perdu un peu d'attention auprès d'un certain nombre d'annonceurs, mais ce n'est absolument pas le cas pour les lecteurs. » 
« D'une manière ou d'une autre, au risque de se répéter, nous disons qu'il y aura une continuité de service après le 1er juillet. Personne ne prendra le risque d'arrêter la distribution, ni les politiques ni les éditeurs.

« Quoi qu'il arrive, nous nous engageons à continuer de livrer ces 2,9 millions de Belges qui nous lisent chaque jour sur papier », insiste Pierre Leerschool, Administrateur délégué et Directeur Général de Sud Info.
Tout comme les autres éditeurs, Rossel déplore le changement abrupt imposé par le politique et rappelle les enjeux : ils sont financiers évidemment, mais opérationnels avant tout, « parce que bpost est le partenaire privilégié pour 80% de la distribution aux abonnés ». Olivier De Raeymaker : « On nous dit que le modèle économique va changer (la fin de la concessionn ndlr.), mais le modèle opérationnel ne peut pas évoluer de manière aussi radicale et rapide. Nous ne pouvons pas revoir ce modèle en six mois. » Il répète que le sujet n'est pas tant la presse que bpost en tant qu’entreprise : « C'est ce qui ressort que tous les contacts que nous avons eus ces derniers mois : nous sommes les victimes collatérales. »  
 
Quoi qu’il en soit, le Directeur du Soir se réjouit des avancées récentes qui résultent des rencontres entre les quatre éditeurs et les vice-premiers ministres. Ces discussions, motivées par la volonté commune de trouver une solution au dossier de la distribution des journaux, ont mené à des progrès significatifs. 
 
« Aujourd'hui, le politique nous écoute », résume Olivier De Raeymaker, soulignant l'importance de ces échanges dans la recherche d'une transition structurée. « Ils se rendent compte qu'il y a un certain nombre d'éléments qui ont été pris à l'emporte-pièce et qu'ils ont sous-estimés. Tant sur l'aspect opérationnel que financier. Il va falloir que chacun y mette du sien, mais nous - les quatre éditeurs de presse - espérons trouver une solution qui nous permette de sortir par le haut. »
 
Une solution pour continuer à servir les abonnés de manière qualitative, à un prix accessible pour les lecteurs - « le même pour tous », insiste Pierre Leerschool - et un coût raisonnable pour les éditeurs. « C'est très important. Les éditeurs sont alignés pour trouver un modèle basé sur un prix de revient parfaitement équitable. Compte tenu de la densité de population et du nombre d'abonnés en Flandre, on considère que le prix de revient d'un journal y est moindre que dans certains coins de Wallonie, mais nous estimons que le prix de distribution devrait être identique pour distribuer Le Soir et De Standaard à Anvers, ou l'Avenir et La Meuse dans le Namurois. »
 
La problématique serait donc la même pour les deux parties du pays : le surcoût lié à la décision du gouvernement est trop important. « Nous devons donc trouver une solution basée sur un modèle économique et sur une transition plus lente », martèlent à l’unisson les dirigeants de Rossel. 
 
Pierre Leerschool : « Nous souhaitons poursuivre le partenariat avec bpost et trouver une solution financière acceptable avec eux. C'est ce sur quoi nous travaillons. Mais s'il s'avère que nous ne trouvions pas d'accord, nous envisageons d'autres solutions avec des prestataires privés, voire organiser nous-mêmes notre propre distribution. Nous nous préparons aussi à cette hypothèse, même si nous préférons la continuité avec bpost. » L’objectif est d’aboutir à une solution d'ici la fin mars. « C'est notre date butoir », ajoute le patron de Sud Info.
 
« Il n'y a aucune logique à ne pas avoir un modèle unifié pour l'ensemble du territoire. Les éditeurs parlent donc d'une seule voix vis-à-vis du politique », développe son homologue au Soir. « Pour des raisons juridiques et commerciales évidentes, bpost discute avec chaque éditeur séparément mais ces discussions sont cohérentes et parallèles. Je le répète : nous cherchons une solution homogène sur l'ensemble du territoire belge ou, à tout le moins, homogène sur chacune des régions. Cela ne fait aucun sens de répartir les journaux de Rossel et IPM chez des distributeurs différents.
 
Quid des tarifs, sont-ils susceptibles d’évoluer ? « La volonté est de ne pas aller au-delà des augmentations déjà opérées. Ni que les prix varient en fonction du domicile des abonnés », rassure Pierre Leerschool. Il n’empêche, le coût de distribution sera vraisemblablement plus cher - on parle d'une hausse probable de plus de 50% pour les éditeurs… « Nous sommes capables d'assumer ces hausses pour une continuité de service. A tout le moins pendant un certain temps », remarque Thierry Hugot. 
« Le vrai problème n'est pas seulement celui du prix mais celui de ce timing impossible à tenir ! Nous pourrons pallier des prix élevés pendant un certain laps temps, mais pas sur le long terme. Du reste, nous avons des benchmarks, nous connaissons les prix des Pays-Bas où DPG Media et Mediahuis travaillent déjà main dans la main, et ceux de la France, où nous nous chargeons nous-mêmes de la distribution de 400.000 journaux via différents dépositaires de presse qui développent leur propre réseau de portage. »
En résumé, la priorité des éditeurs est de trouver un accord avec bpost, au moins pour les deux prochaines années. « C'est la solution la plus socialement responsable pour garantir l’accès à l’information pour tous », conclut le CCO et CMO de Rossel.  

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